La garantie VISALE est un mécanisme institué il y a quelques années pour permettre à plus de 320.000 ménages (page 22 du rapport pour 2018) de bénéficier d’une caution de l’Etat par l’intermédiaire d’ACTION LOGEMENT.
Loin d’être parfait, le dispositif a été amélioré au fil des ans et a créé de nombreux partenariats avec notamment LAPOSTE et CENTURY 21.
L’insuffisance des fonds du dispositif VISALE :
Il faut savoir que d’après le rapport d’activité 2018, ACTION LOGEMENT immobilisait « seulement » 95 millions d’euros pour plus de 320.000 locations en 2018.
Un calcul arithmétique simple permet de prendre conscience de la fragilité de cette garantie face à la crise sanitaire en cours.
Face à une crise dont l’INSEE nous annonce chaque jour qui passe des chiffres toujours plus calamiteux, imaginons qu’un locataire sur deux ne règle plus un petit mois de loyer dans les prochains mois.
Quelle serait alors l’efficacité du fonds, dans sa configuration actuelle ?
Imaginons qu’un locataire sur deux ne paye pas simplement un mois de loyers
95.000.000 € / 160.000 contrats de location = 593,75 € … de garantie.
Le fonds de garantie peut-il être renforcé aisément ?
Alors que c’est la BCE qui accordera des crédits pour les entreprises, avec la garantie de l’Allemagne, espérons que le fonds de garantie sera substantiellement renforcé.
Mais, c’est là qu’il risque d’y avoir une difficulté politique : pourquoi le contribuable français devrait-il être amené à garantir les loyers pour des propriétaires « nantis » ?
Il est probable que le fonds soit renforcé mais « en même temps » qu’il le soit très insuffisamment.
Le fait que l’Etat suspende le paiement des loyers pour les micros entreprises en dit long sur le respect à l’égard des bailleurs.
A minima, on peut légitimement douter que l’Etat concentre ses efforts sur le soutien inconditionnel des bailleurs.
Comment le bailleur doit réagir en cas d’impayés ?
En cas d’impayé, le bailleur doit très rapidement prendre contact avec le locataire pour faire le point avec le locataire.
Si le bailleur n’est pas convaincu par la solvabilité du locataire, son intérêt est de rapidement obtenir la résiliation du bail.
Pourquoi ?
Plusieurs raisons :
– Cela met la pression sur le locataire qui, voyant que son bail risque d’être résilié, se rend compte de l’importance de régler son loyer plutôt que NETFLIX ou son abonnement Call Off Duty lub de sport. Il est donc fortement incité à régulariser sa dette locative.
– De le vendre libre et dans de meilleures conditions
– De le relouer ou de l’utiliser selon ses besoins,
– Et d’éviter que son bien ne se trouve de force assujetti à une réglementation d’exception.
NB :
Le bailleur doit vérifier qu’il bénéficie encore du dispositif VISALE (la caution dure 36 mois) et pour combien de temps encore.
Le strict respect de la procédure imposée par le dispositif VISALE :
Le locataire étant garanti par le dispositif VISALE, un accord amiable sera difficile à trouver, à moins que le bailleur renonce à une partie des loyers en cas de départ rapide des lieux.
A défaut, le bailleur doit respecter à la lettre les nombreuses conditions de délais et de formes imposées par le dispositif VISALE.
A défaut, il y a un risque qu’ACTION LOGEMENT en tire argument pour refuser sa garantie ou l’amoindrir, au moins dans un premier temps.
Il faudra missionner dès que possible un Huissier pour signifier un commandement visant la clause résolutoire, car c’est le premier acte procédural qui permet d’enclencher une procédure qui s’apparent à un véritable parcours du combattant en droit français.
En ces temps compliqués, faut-il faire confiance à VISALE en cas d’impayé ? Hélas NON !
ATTENTION, il y a potentiellement un piège pour le bailleur :
Si la vague des loyers impayés est trop haute, il ne faudra pas attendre qu’ACTION LOGEMENT n’engage la procédure.
Pourquoi ?
Dans cette éventualité, le dispositif VISALE ne sera vraisemblablement pas efficace, et on voit mal politiquement, la société ACTION LOGEMENT engager des wagons de procédure en acquisition de clause résolutoire à l’encontre de locataires éprouvés par la crise sanitaire et ses conséquences.
C’est politiquement intenable, et ACTION LOGEMENT essaiera, de bonne foi, de gagner du temps.
En conclusion, ce sera donc au bailleur d’introduire la procédure le plus rapidement possible.
Pourtant de nombreux bailleurs, pour économiser les frais de procédure et pensant qu’ACTION LOGEMENT va faire le nécessaire pour résilier le bail, vont attendre que la caution saisisse le Tribunal judiciaire.
Ce pari est risqué, car même si ACTION LOGEMENT faisait le nécessaire, la jurisprudence n’est pas claire.
La recevabilité contestable et hasardeuse d’ACTION LOGEMENT pour résilier le bail :
Parce que s’il ne fait pas débat que la société ACTION LOGEMENT SERVICES soit recevable à réclamer les loyers qu’elle a été amenée à garantir, il parait douteux qu’elle puisse se prévaloir de la clause résolutoire insérée au bail.
Cette recevabilité douteuse ferme d’emblée la voie du référé (procédure rapide), de sorte que durant toute la durée au fond, plus longue, le bailleur risque de voir sa garantie s’éteindre alors qu’ACTION LOGEMENT n’aura aucun intérêt à se presser d’obtenir la résiliation du bail.
Il faut donc faire confiance à ACTION LOGEMENT.
De facto, tout cela va accroître la durée de la procédure.
Par ailleurs, à ma connaissance, la Cour de Cassation ne s’est pas encore prononcée sur la recevabilité des demandes de résiliation de bail / acquisition de clause résolutoire initiées par la société ACTION LOGEMENT.
De nombreux tribunaux d’instance ont jugé ACTION LOGEMENT irrecevable à demander l’acquisition de la clause résolutoire, mais les juridictions d’appel ont systématiquement infirmé les ordonnances de référé, avec une motivation pas vraiment convaincante.
La Cour d’appel de Paris, (Pôle 4, Chambre 3, Arrêt du 21 février 2019, Répertoire général nº 18/17748), conforme à d’autres décisions d’autres Cours d’Appel, a jugé la société ACTION LOGEMENT SERVICES recevable en sa demande d’acquisition de clause résolutoire.
Or, il n’est loin d’être certain que cette position soit confirmée par la Cour de Cassation s’il elle était saisie de la question.
En effet, et comme cela avait été jugée par le juge du premier degré dans cette affaire, l’action en résiliation de bail est une action personnelle du bailleur lequel dispose du droit le plus absolu sur son bien.
Cette action en résiliation de bail, d’après le juge du premier degré, n’est pas transférée à la société ACTION LOGEMENT SERVICES (VISALE).
L’action de la société ACTION LOGEMENT SERVICES est en effet une action en paiement, celle-ci étant subrogée dans les droits du bailleur à hauteur des dettes qu’elle a payées à la place du locataire.
On voit mal à quel titre, la caution, qui est un contrat accessoire à un contrat principal se trouverait pourvu de droits concurrents avec le bailleur.
Par ailleurs, la clause résolutoire est une clause d’interprétation stricte, et la jurisprudence est constante sur ce point. Le contrat de bail et la loi prévoient que c’est le bailleur et non la caution qui peut s’en prévaloir.
C’est une clause qui est légalement réglementée par la loi du 6 juillet 1989.
On voit mal comment une caution pourrait faire délivrer un commandement de payer, puisque c’est contractuellement le bailleur et lui seul qui doit faire signifier un commandement.
Pour autoriser à ce que la société ACTION LOGEMENT SERVICES, (VISALE), il faudrait que le commandement soit signifié à la demande du bailleur et qu’il se joigne à la procédure.
En conclusion :
Tout cela est bien compliqué et hasardeux, et en immobilier, cela peut s’avérer catastrophique.
Le bailleur doit s’épargner le stress et les aléas d’une procédure fragilisée par des questions de recevabilité.
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