Après un Krach boursier historique, la crise sanitaire du Covid 19 risque d’impacter lourdement l’économie, ce qui devrait par ricochet fragiliser le secteur immobilier dopé au taux bas.
Alors que la plupart des commerces sont à l’arrêt, les charges immobilières, et notamment les loyers commerciaux continuent à courir.
A ce sujet, la suspension des loyers commerciaux annoncée par le Ministre de l’Economie en personne, est provisoire et ne concerne que les petites entreprises en grande difficulté, c’est à dire, au bord du dépôt de bilan.
Ensuite, il faut croire aux promesses de Monsieur Lemaire, mais ça c’est une autre question.
Quoiqu’il en soit, sans doute est-il temps d’anticiper, et de se poser certaines questions, sur le poste charge immobilière du bilan, notamment si vous êtes dans la situation où :
- Le bail commercial atteint 9 ans très prochainement,
- Le bail commercial a déjà plus de 9 ans et se continue par tacite prolongation (aucun congé ni demande de renouvellement n’a été notifiée par le bailleur ou le preneur)
Aussi paradoxal que cela puisse paraître, si le preneur souhaite conserver le local, même provisoirement, peut-être est-ce le moment idéal pour demander le renouvellement du bail commercial.
Pourquoi ?
Voici quelques avantages à procéder rapidement à une demande de renouvellement :
- Le loyer du bail renouvelé s’apprécie au jour de la date du renouvellement.
- Toute demande de renouvellement prend effet au terme du bail expiré, ou si le bail est déjà expiré, au dernier jour du trimestre civil.
Exemple :
Si un bail commercial de 3/6/9 ans est signé le 3 janvier 2011 avec une date d’effet au 1er janvier 2011, son terme est au 31 décembre 2019.
Si, aucune demande de renouvellement ou congé avec offre de renouvellement n’a été notifiée, le bail commercial est en tacite prolongation depuis le 1er janvier 2020.
Le preneur peut notifier d’ici le 31 mars 2020, une demande de renouvellement de bail avec effet, elle prendra effet au 1er avril 2020, en pleine crise du corona virus, avec une commercialité très affectée.
Si le loyer commercial est élevé, cela peut justifier un déplafonnement du loyer commercial à la baisse.
Autre avantage de solliciter le renouvellement : la demande de renouvellement n’engage le preneur que si le loyer proposé est accepté par le bailleur. D’où l’opportunité de solliciter un loyer très faible.
En effet, tant que le loyer n’est pas accepté, où qu’une décision judiciaire définitive n’est pas intervenue, le preneur peut à tout moment se dédire.
C’est donc un moyen de bloquer le local, de le conserver, de négocier une baisse de loyer.
En pleine crise du corona virus et confinement quasi généralisé (au moment où j’écris cet article), il est probable que le marché immobilier sera impacté et que la valeur locative sera dépréciée.
Cela sera un excellent moyen pour négocier avec le bailleur un loyer dans les meilleures conditions.
Quelle est la procédure ?
Après avoir notifié une demande de renouvellement, (par LRAR ou par Huissier, s’il est possible d’en trouver un), si le preneur veut faire rapidement baisser les loyers, il faut qu’il notifie un mémoire, puis qu’il saisisse par Avocat le Juge des Loyers Commerciaux d’une demande tendant à la fixation du loyer à la baisse à la valeur locative.
Cette demande doit aller très vite.
Elle permet en effet :
– d’engager une négociation avec le bailleur,
– et, à défaut d’accord dans le mois, de solliciter par voie d’assignation devant le Tribunal Judiciaire du lieu de situation de l’immeuble, la fixation du loyer de renouvellement qui prendra effet rétroactivement à la date d’effet du renouvellement.
Il faut savoir qu’un loyer provisoire est en principe déterminé par le Juge des loyers commerciaux, le temps de la procédure, qui nécessite une expertise judiciaire.
Nota :
Jusqu’à présent, le loyer provisoire était fixé au montant du loyer, mais il est possible que le Juge des Loyers tienne compte de la situation exceptionnelle qui va affecter les entreprises dans les prochains mois, ou encore la préservation de l’emploi, si les charges immobilières venaient à trop peser sur le bilan .
Le coût de l’Expertise judiciaire en région parisienne est élevé, et doit être avancé par le demandeur, en l’occurrence le preneur s’il veut faire baisser le loyer.
C’est toutefois une simple avance, et en pratique, sous réserve de l’appréciation du juge, si le preneur obtient gain de cause, les frais d’expertise doivent lui être remboursés.
L’expertise judiciaire, commence après paiement de la consignation, transmission des pièces du dossier à l’Expert, et se déroule la plupart du temps en deux temps :
- une première réunion rendez-vous sur place, dans les locaux commerciaux, pour que l’Expert judiciaire et les partis constatent contradictoirement la commercialité, et les différents motifs de déplafonnements.
- une deuxième réunion au Cabinet d’Expert qui donne de manière informelle son avis sur les différentes questions posées par le dossier, notamment, la valeur locative, la valeur de l’indemnité d’occupation, la crédibilité des motifs de déplafonnement, etc.
- L’Expert soumet un pré-rapport
- Après réception des DIRES récapitulatifs (notes d’observations des avocats des parties) l’Expert rend son rapport définitif, en prenant soin de répondre aux arguments soulevés.
Puis, à défaut d’accord sur le montant du loyer de renouvellement, c’est au Tribunal Judiciaire, après notification et réception des mémoires des parties, de trancher, et de fixer par jugement le montant du loyer renouvelé, ladite valeur prenant nécessairement effet à la date du renouvellement.
La Loi PINEL a fixé récemment une limite : quelle que soit le montant du loyer de renouvellement, le loyer ne peut plus augmenter de plus de 10% d’une année sur l’autre.
Sauf exercice de l’appel, le preneur et le bailleur peuvent alors décider d’accepter le montant fixé et signer un acte de renouvellement, ou alors, l’un ou l’autre peut rétropédaler et indiquer à l’autre partie qu’il n’est pas d’accord sur ce montant.
Autre avantage, dans ce dernier cas, le preneur sera redevable d’une indemnité d’occupation à compte de la date d’effet de la demande de renouvellement.
Dans un contexte de hausse des loyers, cela était pénalisant, mais si les loyers venaient à baisser…en cas de déplafonnement à la baisse, cela signifie un montant fixé à la valeur locative, encore corrigé d’un coefficient de précarité (5-10%), de sorte que c’est le bailleur qui lui serait redevable.
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