Comme l’indique son nom, l’Expert judiciaire a pour particularité d’être désigné par une décision de Justice, en référé ou au fond.
POURQUOI UN EXPERT JUDICIAIRE ?
Lorsqu’une solution juridique dépend d’un avis technique, la juridiction peut décider, soit d’office, soit à la demande d’une partie de nommer un Expert inscrit sur la liste des Experts Agréés près la Cour d’Appel.
Les règles de procédure civile précisent que la désignation d’un Expert ne peut suppléer la carence d’une partie dans l’administration de la preuve.
En d’autres termes, même lorsqu’une procédure tend à la désignation d’un Expert, il faut des éléments tangibles qui permettent à la Juridiction saisie d’une telle demande de se prononcer sur l’opportunité de désigner un Homme de l’Art.
En pratique, outre les pièces contractuelles, devis, factures, correspondances, il faut produire aux débats un procès-verbal de constat d’Huissier, une injonction administrative (Ex : ravalement), pénale, des attestations de techniciens, un rapport d’expertise amiable (Ex : à la suite d’un dégâts des eaux.)
A défaut, la demande peut être rejetée, et le demandeur condamné à indemniser la ou les partie(s) défenderesse(s) à un article 700 du NCPC.
CHOIX DE L'EXPERT
Il appartient au Magistrat. Il est possible de contester le choix si l’Expert ne présente pas toutes les garanties d’impartialité exigée par la procédure.
Ex : l’Expert judiciaire désigné a déjà rédigé un rapport d’expertise amiable en faveur d’une partie.
Si plusieurs types de désordres sont sériés et/ou plusieurs domaines de compétences sont concernés, le Tribunal peut désigner plusieurs Experts.
Ex : problèmes de bruit (Expert acousticien) et problème de fuite (Expert immobilier)
L’Expert peut lui-même désigné un « sapiteur », personne qui a des connaissances spécifiques sur certains aspects des problèmes technique soulevés par l’Expertise.
MISSION DE L'EXPERT
Elle est exclusivement limitée à l’Ordonnance ou le Jugement qui désigne l’Expert. Il est donc particulièrement important de vérifier la mission demandée, laquelle comporte des formes types selon la mission.
Ex : référé préventif en matière de construction
La mission de l’Expert se concrétise par un rapport qu’il lui appartient de déposer dans les délais fixés par la décision le désignant.
CONSIGNATION ET HONORAIRES DE L'EXPERT
Les opérations d’expertise ont un coût qu’il appartiendra en principe à celui ou ceux à qui incombe(nt) la responsabilité de prendre définitivement en charge.
C’est pour cette raison que la décision qui désigne l’Expert Judiciaire fixe le montant de la consignation, c'est-à-dire une avance à valoir sur les honoraires de l’Expert ainsi que le délai pour consigner.
Cette consignation est de facto une avance à valoir sur les honoraires de l’Expert.
En principe, la consignation est à la charge du demandeur aux opérations d’expertises. A défaut de consignation dans les délais, la désignation de l’Expert est caduque.
A PARIS et en matière immobilière, il est rare que le montant de la consignation soit inférieur à 1.500 €.
Le délai varie entre 7 jours et 3 mois selon l’urgence, la matière et les juridictions.
Le coût des diligences de l’Expert n’est donc pas négligeable est très important dans la prise de décision :
Si l’Expertise s’avère sous-évaluée ou se heurte à des difficultés particulières nécessitant des diligences supplémentaires, l’Expert peut demande des honoraires supérieurs à la consignation, soit pendant les opérations d’Expertises, soit lors du dépôt de son rapport.
Il est possible de contester les honoraires de l’Expert par une procédure spécifique devant le Premier Président de la Cour d’Appel de PARIS.
RÔLE DES PARTIES ET DE LEURS CONSEILS
Les Avocats doivent dès la consignation réalisée, communiquer les pièces de la procédure et toute autres pièces utiles aux intérêts de leurs clients.
Les parties et leurs conseils sont convoqués aux opérations d’Expertise selon un calendrier déterminé par l’Expert. En principe, la convocation précise l’objet de la réunion.
Lors d’une réunion d’Expertise, l’Expert note le nom des parties assistant aux opérations d’Expertises ainsi que des Avocats.
L’Expert procède aux constatations techniques, demande que lui soient communiquées les pièces, demander qu’il soit procédé à des investigations, que soient établis des devis.
Toute communication de pièce à l’Expert doit également être réalisée à l’ensemble des parties.
De son coté, l’Expert rédige des NOTES AUX PARTIES à l’occasion desquelles il note les contestations et les déductions techniques, ainsi que les diligences qu’il souhaite voir accomplies par telle partie.
Les Avocats rédigent le cas échéant des DIRES à Expert, actes aux termes desquels ils font des observations officielles sur les opérations d’expertises. Ces DIRES répondent à des conditions de formes, et doivent être annexés au rapport d’Expertise. L’Expert est tenu d’y répondre dans la limite de la mission définie par la décision de Justice le désignant.
CONTROLE DES OPERATIONS D'EXPERTISES
En matière immobilière, et contrairement à une idée reçue, il n’existe pas de « contre-expertise ».
Lorsque des difficultés surgissent au cours des opérations d’expertises, chaque partie et l’Expert lui-même peuvent saisir le Magistrat du Contrôle des Expertises.
Le Magistrat du contrôle des expertises convoque alors l’ensemble des parties et, le cas échéant, l’Expert, pour les entendre dans le cadre d’une audience spécifique.
Ex : difficulté d’interprétation sur la mission de l’Expert,
prise en charge du coût de telle mesure complémentaire,
opportunité de s’adjoindre les services d’un sapiteur.
RAPPORT DE CARENCES
Lorsque certaines pièces ne sont pas communiquées ou que certaines diligences ne sont pas accomplies par les parties, l’Expert peut dresser un rapport de carence aux termes duquel il indique à la Juridiction qu’il n’a pas été en mesure de remplir la mission qui lui avait été assignée en raison du défaut de diligence de telle partie.
Il est donc essentiel de répondre aux demandes de l’Expert dans les meilleurs délais.
ORDONNANCES COMMUNES
Si au cours des opérations d’Expertise, il s’avère qu’une partie qui n’avait pas été assignée pourrait avoir une part de responsabilité dans les désordres constatés, il est nécessaire d’assigner cette partie afin que les opérations d’expertises lui soient opposables.
Selon les règles de procédure civile, il est nécessaire de recueillir préalablement l’avise de l’Expert pour réaliser cette mise en cause.
Stratégiquement, il n’est pas forcément opportun d’assigner immédiatement toutes les parties lesquelles constitueront un front commun de défense lors des opérations d’expertises. Il peut donc être préférable d’assigner au fur et à mesure telle partie, même si dès l’origine de la procédure, leur implication dans l’origine des désordres paraît vraisemblable.
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